The Fallen Fruit Under the Paradise (Novel) - Chapitre 16
⚠️ Attention ⚠️
Ce roman peut contenir des scènes s£xuelles explicites et potentiellement des descriptions de viol ou d'agression s£xuelle.
Ainsi, Lisbell définit fermement l’un des traits de son caractère. C’était un homme doté d’une impulsivité certaine. Autrement, rien de ce qu’il venait de faire n’aurait eu le moindre sens.
Au loin, la lune scintillait. Sa lumière claire et cristalline était aussi vive que les yeux de Théodore posés sur elle.
Le calme précaire qu’elle avait réussi à retrouver s’effondra brutalement.
Cela ne doit pas arriver.
Quelque chose sonnait comme un avertissement. Cette proximité était dangereuse.
Elle ne pouvait pas rester ainsi, si près de lui.
Elle devait mettre de la distance entre eux.
Elle devait s’éloigner immédiatement.
S’éloigner de lui…
— Il me semble que vous avez trop bu.
Elle devait le repousser.
Dans un mouvement précipité, Lisbell recula légèrement, comme pour annuler ce qui venait de se produire.
L’espace entre eux, où leurs souffles s’entremêlaient quelques instants plus tôt, s’agrandit enfin, et la cravate qu’Ulrich tenait encore faiblement glissa entre ses doigts.
Lisbell passa nerveusement une main dans ses cheveux. Son esprit était en pagaille, comme si quelqu’un avait attrapé sa tête pour la secouer violemment.
Mais le plus incompréhensible restait l’attitude d’Ulrich.
Il savait qu’elle était fiancée.
De ces lèvres délicates, il l’avait félicitée le jour même de leur première rencontre. Il lui avait demandé la date du mariage, avait même évoqué la fin de l’été où elle deviendrait une épouse, lui adressant des mots qui ressemblaient à une bénédiction.
Et pourtant, malgré tout cela… pourquoi ?
Elle était envahie de doutes, mais elle refusa d’approfondir la question. La seule pensée qui subsistait, irréfutable, c’était que cela ne devait pas arriver.
Sans dire un mot de plus, Lisbell défit la cravate encore nouée autour de son cou et la reposa dans la boîte. Puis, elle se leva brusquement.
— Je vais rentrer.
— …
— La brise du soir est fraîche, ne restez pas dehors trop longtemps.
Sans chercher à savoir si ses paroles étaient appropriées à la situation, elle quitta précipitamment le pavillon.
Peut-être était-elle encore sous le choc, car le vent sur son visage lui sembla brûlant.
Le regard de cet homme, croisé de si près, lui revenait sans cesse en mémoire, la troublant jusqu’au plus profond d’elle-même. Dans une tentative désespérée pour chasser cette impression persistante, elle mordit violemment sa lèvre inférieure jusqu’à en sentir le goût du sang. Mais même cette douleur ne parvint pas à lui rendre toute sa lucidité.
De retour dans sa chambre, Lisbell passa de longues heures à se retourner dans son lit, incapable de trouver le sommeil.
La nuit s’étira douloureusement, puis céda la place à l’aube, avant que le jour ne s’installe complètement.
C’était une nuit étrange, comme si elle avait été ensorcelée par quelque chose d’inconnu.
Il n’y avait pas d’autre explication possible à son état d’agitation.
Un trouble inexplicable la rongeait de l’intérieur, la torturant sans répit.
Oui… c’était un véritable supplice.
Puisqu’elle ne parvenait pas à dormir, Lisbell se leva tôt et se prépara en toute hâte pour son départ.
Sa mère, qui commençait son travail à sept heures précises, passa par sa chambre pour lui dire au revoir. En la voyant déjà prête, elle sembla légèrement surprise.
Tenant fermement ses bagages, Lisbell suivit sa mère hors de la villa. Son regard, désormais familier avec le jardin qu’elle avait côtoyé ces deux dernières semaines, s’attarda sur un endroit précis.
La piscine extérieure, vidée pour nettoyage.
Elle se remémora la vision de l’eau transparente éclaboussant sous le soleil.
— Lisbell ?
— Oui, allons-y.
Elle reprit ses esprits et pressa le pas.
Arrivée au portail, entrouvert juste assez pour laisser passer une personne, elle serra brièvement sa mère dans ses bras.
— Appelle-moi dès que tu seras prête. Je viendrai à Misley.
Sa mère toussa légèrement.
Inquiète, Lisbell ajusta le châle qu’elle avait jeté à la hâte sur ses épaules en raison de la fraîcheur matinale.
— Mère, es-tu certaine que tout va bien ?
— Oui, ce n’est qu’un léger rhume, sans doute à cause du changement de saison.
— Ne le néglige pas sous prétexte qu’il est léger. Prends bien tes médicaments, d’accord ?
— Je le ferai. Mais file, ou tu vas manquer ton train.
— Je t’appellerai dès mon arrivée.
— D’accord.Après une dernière étreinte, Lisbell jeta un coup d’œil au jardin.
Les courbes élégantes du pavillon attirèrent son regard, et elle se figea aussitôt, comme si elle s’était brûlée.
Sa mère, remarquant son trouble, fronça légèrement les sourcils.
— Je pars maintenant.
Avant qu’elle ne puisse poser la moindre question, Lisbell se détourna brusquement et s’éloigna à grands pas, ressentant davantage l’urgence d’une fuite que le départ d’une simple villégiature.
L’impression laissée par cette nuit persistait en elle comme une tâche indélébile.
Le poids de la confusion l’écrasait encore.
****
Après avoir vu sa fille partir, Madame Osborne reprit le cours habituel de sa journée.
Elle s’occupa des tâches prévues dès sept heures du matin, comme à son habitude, sans perdre une minute.
Puis, elle se rendit de nouveau au portail pour récupérer le courrier apporté par le livreur.
Traversant le jardin, elle jeta un œil à sa montre de poche et constata qu’il restait encore un peu de temps avant midi.
Avant de se rendre dans la chambre principale, Madame Osborne s’arrêta devant la chambre d’amis où sa fille avait séjourné.
— Oh…
Elle connaissait bien Lisbell et s’attendait à trouver la pièce dans un état impeccable. Pourtant, à sa grande surprise, la chambre était encore légèrement en désordre, témoignant d’un départ précipité.
Poussant un léger soupir, Madame Osborne en profita pour ranger un peu.
Elle lissa la couverture froissée, ouvrit la fenêtre entrouverte pour aérer la pièce et replia les serviettes dans la salle de bain. Puis, en se retournant, son regard se posa sur une blouse rose pâle suspendue à un cintre doré.
— Dans quel état d’esprit était-elle pour oublier cela ?
Qu’est-ce qui avait bien pu la pousser à partir ainsi, à la hâte ?
Perplexe, elle prit la blouse et la drapa sur son bras.
Lorsqu’elle termina de remettre la chambre en ordre, il était presque midi. Elle quitta la pièce et s’engagea dans le couloir en direction de la chambre principale.
Soudain, une quinte de toux violente la plia en deux, courbant son dos comme celui d’une vieille femme. La douleur lui lacéra la gorge et les poumons.
S’appuyant contre le rebord d’une fenêtre, elle sentit un goût métallique sur sa langue. Lorsqu’elle cracha, des traces de sang teintèrent ses lèvres. L’odeur ferrugineuse se répandit sous son nez tandis qu’un vertige lui brouillait la vue.
Elle resta ainsi, immobile, s’appuyant contre le cadre de la fenêtre.
Au moins, Lisbell ne l’avait pas vue ainsi.
Chaque fois que sa fille lui demandait si elle allait bien, son cœur se serrait, mais elle parvenait toujours à garder contenance.
Pas encore.
Si Lisbell venait à l’apprendre, elle se sentirait obligée de rester à ses côtés pour prendre soin d’elle.
— Je veux encore être proche de toi, Mère.
Sa fille, qui ne pouvait même pas imaginer qu’elle puisse être malade, lui faisait déjà ce genre de propositions avec tant d’affection. Si elle découvrait la vérité, elle insisterait davantage encore.
Lisbell avait toujours été ainsi.
Petite, elle cueillait de jolies fleurs sur la colline pour les offrir à sa mère. Plus tard, elle s’appliqua à obtenir de bonnes notes sans jamais demander une aide financière pour ses études. Et pendant ses années d’université, elle appelait toujours le même jour, à la même heure, pour prendre des nouvelles et raconter les siennes.
Ce que le monastère qualifiait d’existence pécheresse était, aux yeux de Madame Osborne, une fierté.
Elle aussi aurait voulu passer ses dernières années auprès de sa fille, mais elle refusait d’être un fardeau.
Elle avait eu de la chance de détecter ces signes avant-coureurs.
Le vertige s’estompa légèrement. Se redressant, Madame Osborne prit conscience du temps qu’elle avait perdu et accéléra le pas.
Le clocher de l’église n’avait pas encore sonné. Ce n’était donc pas encore midi.
La chambre principale devait être aussi silencieuse qu’une nuit sous un croissant de lune.
C’est en gardant cette pensée en tête qu’elle ouvrit la porte.
— …
Contre toute attente, le maître de maison était déjà réveillé.
Appuyé contre la fenêtre, une cigarette entre les doigts, il regardait dehors.
Le clocher n’avait toujours pas retenti.
Le maître s’était levé avant que l’église ne marque l’heure.